Mots clés clés de " La Blessure des Mots " : lyrisme, versification, prosodie, soutien de Paul Guth, poésie d'aujourd'hui, émotion, sensibilité
Dès le berceau, ma langue au chatouillis d'eau claire,
Fine, élégante et souple avec des mots confits
Et qui, s'émerveillant dans la voix d'une mère,
Fit s'élever en moi de somptueux défis ;
Toujours sensible au coeur, ma langue bue à même
Le cristal ingénu d'adorables chansons,
Ma langue intime et forte et si géante même
Que je semblais plus grand, subjugué par tes sons ;
A l'égal d'un chef-d'oeuvre ennobli page à page,
Face au maître d'école habile à t'honorer,
Ma douce langue, tel un pur bouquet sans âge
Où toute l'âme en fleurs se laissait respirer ;
O ma langue brûlante aux yeux de messagère
Dont frissonne l'écho sur chaque homme ébloui !
Au chant de ta syntaxe orgueilleuse et légère,
Les peuples enchaînés rêvèrent l'inouï ;
Amoureusement lue, infiniment apprise,
Ma langue haute en grâce et belle en dons joyeux,
A la clarté suave, à l'euphonie exquise
Et grisée -ô combien !- de tours délicieux ;
Toi ma langue si libre au-delà de tes fleuves,
Marquée au souffle chaud des hymnes caressants,
Et chez qui l'étranger empli de notes neuves
Enlace le lexique à travers mille accents ;
Oui ma langue jaillie en fontaines de soie,
Délectable et limpide ainsi qu'un angelot !
Ma langue lisse comme une onde qui flamboie
Et dont maints grands auteurs ont enrichi le flot...
____________________________________________
Ah ! Que demain jamais rien de laid ne t'advienne !
Que rien ne puisse un jour te vaincre ou te ternir !
Ma langue à la fois tendre, affable et magicienne,
Ma langue sidérale énorme d'avenir.
Que pour des temps fameux, ton prestige demeure !
Qu'à lui seul ton génie allège un peu nos maux !
O ma langue où longtemps j'ai fixé ma demeure !
Ma langue où je mourrai, plein du ciel de tes mots.
Poème extrait de la " Blessure des Mots "